LES ANTI-HISTAMINIQUES
Dr J.C. BONNEAU
L'Histamine est une amine naturelle
contenue dans de très nombreux tissus. Depuis
longtemps, on sait que c'est un médiateur
pro-inflammatoire qui joue un rôle essentiel
dans l'inflammation allergique. Plus récemment,
on a pu mettre également en évidence
son rôle dans la régulation de l'inflammation
allergique et dans de nombreux processus immunologiques.
Un rappel sur la synthèse
et le catabolisme permet de mieux appréhender
certains faits cliniques, ainsi que le mode d'action
des anti-histaminiques.
Il en va de même de la
compréhension des mécanismes de libération
non immunologique ou par réaction antigène/anticorps,
celle-ci se fixant alors sur les récepteurs
de l'histamine.
Jamais famille thérapeutique
n'a connue autant de travaux depuis l'avènement
de la 3e génération des anti-histaminiques
dont le premier a été la Terfénadine,
même si après un succès
fulgurant, cette molécule a connu quelques
déboires qui ont conduit à son retrait.
Hier, les anti-histaminiques
de 1 ere et 2eme générations étaient
caractérises par un effet compétitif
vis-à-vis des récepteurs HI de Histamine.
Aujourd'hui, il est démontré que les
antihistaminiques de 3e génération
possèdent cet effet de blocage des récepteurs
HI de l'histamine mais également bien d'autres
actions, prouvées par de nombreuses études,
aussi bien chez l'animal que chez l'homme.
Cette classe thérapeutique
semble en effet douée de propriétés
antiallergiques propres
- inhibition de l'activation
des principales cellules impliquées dans
la cascade allergique et probablement modulation
de l'inflammation des voies aériennes par
une action directe sur les cellules épithéliales
concernées.
Sans vouloir reprendre l'ensemble
de ces travaux, on peut rappeler quelques travaux
récents, présentés lors des
dernières réunions internationales,
montrant :
- à la lumière
des résultats préliminaires de l'étude
ETAC, mené chez des nourrissons de 1 à
2 ans, la prévention du développement
ultérieur d'un asthme allergique chez des
enfants souffrant de dermatite atopique, grâce
à l'administration régulière
d'un antihistaminique Cela présente bien
sûr des interrogations quant aux mécanismes
d'action dans ce cadre : inhibition des effets néfastes
de l'histamine sur le développement de l'inflammation
des voies aériennes ? Propriétés
antiallergiques plus larges de cette classe thérapeutique
?
- des travaux récents
ressort la capacité des anti-HI à
réduire l'activation des cellules classiques
impliquées que sont les mastocytes, les basophiles
et les éosinophiles, à inhiber ainsi
la réponse inflammatoire.
On voit donc bien là
les effets importants qui prendront place dans les
indications thérapeutiques et dans le choix
du mode de traitement, tant sur les problèmes
cutanés que sur les problèmes bronchiques.
L'action des anti-histaminiques
paraît également s'exercer au niveau
de la barrière constituée par les
cellules épithéliales au niveau des
muqueuses. Ces cellules constituent bien sûr
une barrière naturelle contre les allergènes
ou les agresseurs divers tels que les bactéries.
Un effet sur l'inflammation provoquée par
la réaction allergique à leur niveau
laisse donc supposer qu'on pourra obtenir une modification
de la cascade allergique en modifiant le relargage
des cytokines et des molécules d'adhésion
intervenant dans la réaction allergique.
Toutes ces études sur
les effets anti-inflammatoires des anti-HI ne sont
pour l'instant pas complètement élucidées
et il faut poursuivre les recherches. Cela toutefois
permet de déboucher sur des indications plus
précises de l'emploi de ces produits.
INDICATIONS
-> ASTHME
L'effet bénéfique
des anti-histaminiques sur l'Asthme induit par le
pollen a été bien décrit, dans
des études réalisées contre
placebo. On constate une amélioration des
paramètres fonctionnels respiratoires sous
traitement antihistaminique prolongé, même
si celui-ci bien sûr n'est nullement prévu
pour supplanter le rôle des beta 2 mimétiques
ou des corticoïdes inhalés, voire de
la Théophylline. Son action de prévention
s'intègre de façon globale dans la
réaction antigènes/anticorps induite
par les pollens et sur l'inflammation qui en résulte.
Il y a donc en quelque sorte là, comme dans
l'ensemble de la pathologie allergique, un rôle
de régulation par les antihistaminiques.
-> RHINOCONJONCTIVITE POLLINIQUE
Les études réalisées
au niveau de l'impact des anti-histaminiques sur
la rhinite ou la rhinoconjonctivite pollinique ne
sont plus à présenter. C'est là
l'une des indications majeures de l'emploi des anti-histaminiques.
Ceux-ci doivent être pris de façon
régulière lors des périodes
de pollinisation, de façon à avoir
le meilleur effet possible sur la phase retardée
de la réaction allergique et sur l'inflammation
qui en résulte.
Des formes galéniques
locales sont intéressantes à proposer,
soit comme collyre, soit comme spray nasal, associées
éventuellement aux formes per os.
-> RHINITE PERANNUELLE
Dans la rhinite perannuelle,
l'emploi des anti-histaminiques, bien tolérés
au long cours, parait là encore intéressant,
permettant d'agir sur la réaction immédiate
et sa phase retardée. Il peut ainsi prévenir
le développement d'une inflammation au long
cours, source de complications infectieuses et mécaniques
par délabrement de la muqueuse.
-> DERMATOSES ALLERGIQUES
Nous avons déjà
évoqué le rôle bénéfique
des anti-histaminiques dans la dermatite atopique.
Outre l'effet propre sur la réaction antigène/anticorps,
il ne faut pas négliger l'effet bénéfique
sur le prurit, source là aussi cliniquement
de surinfections, d'agressions mécaniques
au niveau de la peau qui ne font que compliquer
les troubles.
Un tel effet sur les effets
néfastes de l'histamine est également
montré dans les manifestations de dermatoses
de contact ou d'autres maladies cutanées
impliquant le système immunitaire.
Dans l'urticaire chronique,
des essais cliniques ont été également
pratiqués. Il semble exister une efficacité
clinique pour les anti-histaminiques dans certaines
formes d'urticaire, en particulier celles bien sûr
liées à un mécanisme IgE dépendant
et dans certaines formes d'urticaire répondant
à un stimulus mécanique ou thermique,
voire chimique. Cette indication peut bien entendu
être étendue aux urticaires de contact.
Enfin, l'emploi des anti-histaminiques
peut être discuté plus globalement
dans le suivi et le traitement de nombreuses pathologies
allergiques plus variées, telles que les
réactions aux venins d'hyménoptères,
les manifestations d'urticaire aigue d'origine variée.
TOLERANCE
Les anti-histaminiques de lere
et 2eme génération présentaient
de gros inconvénients par leurs effets délétères
sur le système nerveux central à type
de somnolence, de céphalées et sur
le tube digestif, à type parfois de sécheresse
de la bouche.
Les anti-histaminiques de 3e
génération semblent dépourvus
des effets atropiniques responsables de cette sécheresse
de bouche et ont peu d'effet central. Des études
très nombreuses ont pu montrer la bonne tolérance
grâce à l'étude des tests de
conduite automobile, ou des effets sur le champ
visuel.
Reste le problème des
restrictions d'emploi, imposés par les risques
cardiaques lors d'association de certaines molécules
anti-histaminiques avec certaines molécules
antibiotiques ou antifongiques, ou encore chez des
patients présentant une défaillance
hépatique.
Le strict respect des précautions
d'emploi réduit ces effets pervers et permet
d'avoir une gamme d'antihistaminiques permettant
de répondre à chaque situation clinique.
Loin est le temps où
les anti-histaminiques étaient rejetés
dans de nombreuses indications telles que l'asthme
ou encore du fait de leurs effets secondaires, à
type de somnolence, responsables d'un inconfort
pour les malades.
Seuls le prurit dans l'urticaire
et à moindre degré la rhinite essentiellement
pollinique trouvaient indication pour les anti-HI
classiques.
Les anti-histaminiques de 3e
génération ouvrent le champ à
une nouvelle exploitation de ces molécules,
remarquablement bien tolérées par
l'absence d'effet central ou atropinique. Leur mécanisme
d'action, et par conséquent leur utilisation
se sont élargis et permettent aujourd'hui
une application à des modèles pathologiques
allergiques variés et nouveaux. Il convient
de ne pas négliger leur emploi dans l'ensemble
des pathologies de type allergique.
Il convient également
de rappeler certains nombres de règles concernant
la pratique des tests allergologiques et l'emploi
des anti-histaminiques : la réalisation des
tests cutanés doit être faite après
une période d'arrêt des anti-histaminiques,
chaque fois bien sûr que cela est possible
cliniquement. Un délai classique de 5 jours
est conseillé pour les différentes
molécules, en dehors de l'Astémizole
et du Kétotifène pour lesquels un
délai d'interruption plus long de l'ordre
de 3 semaines est conseillé.
C'est là pour le praticien
de l'allergologie toujours un piège lorsqu'il
est amené à pratiquer des bilans,
d'autant que nombreuses molécules contiennent
ou possèdent des vertus anti-histaminiques
parfois méconnues (ci-joint en annexe la
liste des médicaments actuellement disponibles
présentant une action anti-histaminique et
donc susceptibles de moduler les réactions
cutanées lors des tests).
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